La montagne aux colombes de Serge Marie

  • avril 11, 2025
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Ses inspirations picturales restent toujours à portée de vue : le jardin voisin, l’arbre de la rue, la montagne environnante… Serge Marie est un contemplatif qui se nourrit de l’instant présent. Il sait s’échapper sans parcourir de longues distances, chemin faisant et regard pénétrant.

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Comme Cézanne fut le peintre de la Sainte-Victoire, Serge Marie est celui du Grand Colombier. Ou plutôt de la montagne aux colombes comme il aime à le nommer dans un élan pacifiste. De ce col parmi les plus réputés du Tour de France, même si bien éloigné des Alpes ou des Pyrénées, il a fait sa signature. De ce sommet de l’Ain conduisant à une terre d’alpages rare, il s’est fait un nom. Entre les versions bleues, rouges, vertes, blanches, mordorées ou orangées ; entre les représentations hivernales, automnales ou estivales ; entre l’expression du temps d’avant et celle de l’après, difficile de poser le décompte, mais jamais déclivité ne fut aussi inspirante. « Durant la crise sanitaire, pour ne pas connaître la sensation de l’enfermement et comme un cadeau à notre monde placé sous cloche, je me suis astreint à peindre un Grand Colombier par jour, posté aussitôt sur les réseaux sociaux, évoque-t-il aujourd’hui. Ce dôme est sous mon nez ; il m’invite à l’escapade ; je le regarde toujours de manière différente. En le surnommant la montagne aux colombes, je crois que j’en ai fait un symbole. Il nourrit mon imaginaire. Peut-être même a-t-il fait de moi un peintre ». Car d’abord formé au métier de garde forestier, Serge Marie a tour à tour exercé comme bûcheron, travaillé à l’usine puis dans le chauffage et comme animateur aux côtés d’un ergothérapeute. Comment est-il devenu peintre ? Tout simplement en assemblant les pièces de son puzzle et en apprenant les rudiments à l’école de peintre-décorateur-fresquiste de Nantes, chez Jean-Yves Jodeau.

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À 11 ans, avec sa famille, ce Décinois découvre le plateau d’Hauteville, le Haut-Bugey et la vallée de la Valserine. L’ancrage à cette nature unique ne s’opère pas instantanément, mais de rencontres en hasard, il y revient dans les années 2010 pour installer son atelier à Champagne-en-Valromey, devenu aujourd’hui un lieu d’exposition participatif : la galerie Aguas Calientes, dont on perçoit dans le nom l’esprit un tantinet révolutionnaire. Avant cela, la découverte du travail de Werner Sturb, un artiste mondialement reconnu pour son art du masque, lui confère l’énergie et une sorte de certitude de sa destinée de peintre. De Grand Colombier en Grand Colombier, de points de vue sans cesse renouvelés en regards de plus en plus appuyés, Serge Marie ne vit plus que pour ses pinceaux, ses promenades, les photos qu’il saisit et les champignons qu’il croise en chemin. « J’aime prendre plusieurs clichés et me remémorer l’ambiance d’un lieu pour en donner ma version propre, dit-il. Toujours dans des tableaux réalisés à l’huile, car je veux prendre mon temps et jouer avec les quantités de peinture ». 

Ce timide, qui n’en est peut-être pas un, explore aujourd’hui la poésie des fleurs, des arbres, des massifs… avec autant de productivité que durant sa période Grand Colombier. Aux belles heures de la journée, il s’installe devant son atelier pour peindre, à même la rue, puis il passe dans son arrière-cour quand la lumière faiblit. La galerie est toujours ouverte, animée en permanence par les créations de la céramiste Caroline Blanc et le théâtre de 7 à 8 expositions annuelles. L’an prochain, il devrait accrocher ses toiles chez Ames Sœurs, la maison d’édition textile de la rue Saint-Georges dans le 5e arrondissement de Lyon. Une incursion en terre inconnue comme il aime à les provoquer !


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Galerie Aguas Calientes

382 Grande rue, 01260 Champagne-en-Valromey

sergemarie.com

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TEXTE Nancy Furer
PHOTOS Didier Michalet, DMKF

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